Où va le monde ?
Une telle question n’est-elle pas présomptueuse ? Un proverbe malgache dit « le passé appartient aux ancêtres, l’avenir appartient à Dieu, seul le présent t’appartient ». L’affirmation centrale est claire pour le chrétien, celles du début et de la fin pourront se discuter, mais l’ensemble invite à la prudence et reflète une certaine sagesse.
Le psalmiste affirme avec force « Notre Dieu est au ciel, il fait tout ce qu’il veut » (Ps. 115 :3). Alors pourquoi nous poser cette question « Où va le monde ? », « Quelle est sa dynamique ? », si tant de choses nous échappent. C’est sous l’angle d’observations et prévisions démographiques que nous voudrions approfondir cette question.
Jésus nous invite à réfléchir avant de nous engager : « Car, lequel de vous, s’il veut bâtir une tour, ne s’assied d’abord pour calculer la dépense et voir s’il a de quoi terminer » (Luc 14 :28). Bien sûr, l’enseignement de Jésus concernait en premier lieu la nécessité de bien réfléchir avant de le suivre, d’en évaluer le coût, mais n’est-ce pas aussi une invitation à utiliser cette capacité de réflexion qu’il nous a donnée pour bien situer notre engagement pour lui ?
Sur les trois derniers siècles, la population mondiale a été multipliée par 13 pour arriver aujourd’hui à près de 8 milliards d’êtres humains sur terre, et dans 30 ans nous pourrions être 11 milliards. Cette dynamique préoccupe nombre de dirigeants, elle se croise avec une crise écologique et pose à tous la question du bien vivre ensemble sur terre dans les années à venir.
Pour l’Eglise de Jésus-Christ se pose une autre question : comment répondre à l’appel missionnaire du Seigneur dans un tel contexte (Mat. 24 :14 ; Mat. 28 :18-20) ?
La croissance de 8 à 11 milliards ne sera pas uniforme sur toute la surface de la terre. Depuis 1950, la croissance d’un facteur 3 de la population mondiale a été surtout le fait de l’Asie, et un peu de l’Amérique du Sud et de l’Afrique. La population a beaucoup moins augmenté dans les pays dits riches : Europe, Amérique du Nord. La dynamique actuelle est celle d’un net ralentissement de la croissance de la population en Asie, mais un autre continent a pris le relais… l’Afrique.
Si on veut un peu mieux sentir l’évolution de la population mondiale et commencer à percevoir les enjeux qui s’y dessinent, on doit essayer de se réconcilier avec nos cours de géographie du collège, et les fameuses pyramides des âges ! Pas besoin d’aller chercher bien loin pour trouver ce type d’information, utilisez votre « précieux » préféré, tapez démographie du pays qui vous intéresse et Wikipédia vous proposera dès la première page une bonne synthèse : âge médian, espérance de vie, PIB par habitant.
Commençons par nos vieux pays d’Europe, la France et l’Allemagne par exemple. Coté PIB/ha, force est de constater que nous sommes dans des pays riches. Quant à nos pyramides, elles ne ressemblent pas à celle de Giseh, elles sont plutôt en forme de poupées russes, assez homogènes de 0 à 60 ans. Ainsi en France, l’âge médian est autour de 42 ans et notre espérance de vie proche de 82 ans.
Qu’en est-il en Asie ? Deux pays assez différents et notables peuvent retenir notre attention : le Japon et la Chine. On notera des pyramides des âges à base plus étroite, caractéristiques d’un vieillissement de la population. C’est particulièrement frappant pour le Japon qui a un âge médian de 48 ans, une dynamique qui se traduit déjà par une diminution du PIB par habitant pour ce pays. En Chine, la population reste plus jeune (âge médian de 38 ans), mais on voit bien que la croissance de population a été jugulée avec les mesures draconiennes que l’on connait.
Venons-en à l’Afrique. Nous choisirons deux pays où notre famille d’églises CAEF a engagé des partenariats avec des unions d’églises locales : Madagascar et le Tchad. Quelle surprise si on regarde ces fameuses pyramides des âges, ce ne sont plus des pyramides, mais des fusées ou des toits de pagodes chinoises. Les chiffres parlent d’eux-mêmes des âges médians de 16 et 20 ans pour le Tchad et Madagascar, des espérances de vie autour de 60 ans et des niveaux de vie divisés par 18 et 28. Sur les 60 dernières années, la population française a augmenté de 30 %, quand celles du Tchad et de Madagascar ont été multipliées par environ 5. En 2050, les populations de ces deux pays deviendront comparables à celle de la France. Ces quelques constats peuvent nous interpeller sur nos engagements missionnaires.
Si la population de ces pays connait une belle croissance, l’avenir n’est pas radieux pour autant. Ce sont certes de grands pays avec des ressources naturelles et humaines, mais les structures de formation scolaire et professionnelles y sont fragilisées, les systèmes de santé encore déficients et les économies gangrénées par la corruption et le clientélisme. Si les nouvelles technologies proposent un accès à la culture occidentale moderne, ce n’est hélas pas la meilleure qui y est promue. De sorte que pour beaucoup de jeunes, l’avenir semble passer nécessairement… par l’émigration.
La Bonne Nouvelle de l’Evangile de Jésus-Christ nous invite à relever la tête, à espérer dans l’action de Dieu, à nous mettre en mouvement pour aller travailler là où la moisson est abondante.
Suite au constat que nous venons de faire, 3 défis majeurs peuvent être identifiés :
1 – la jeunesse, là où la moitié de la population a moins de 18 à 20 ans,
Le livre des Proverbes nous exhorte « Instruis l’enfant selon la voie qu’il doit suivre, et plus tard il ne s’en détournera pas. » (Pro. 22:6). L’Eglise se développe dans ces pays, la jeunesse y est nombreuse, mais il importe de pouvoir équiper les différentes structures pour qu’elles gardent leur jeunesse, leur proposant un enseignant enthousiasmant à même de résister aux mirages de la culture bling-bling, aux propositions diverses de recours à la violence et aux invitations mensongères d’une sexualité soi-disant libérée.
2 – le développement socio-sanitaire pour répondre aux besoins criants
L’Evangile est aussi une réponse aux besoins socio-sanitaires « L’Esprit du Seigneur, l’Eternel, est sur moi, Car l’Eternel m’a oint pour porter de bonnes nouvelles aux malheureux; Il m’a envoyé pour guérir ceux qui ont le cœur brisé, Pour proclamer aux captifs la liberté, Et aux prisonniers la délivrance. » (Esaïe 61:1). L’apôtre Jean de la part du Seigneur nous invite à aimer non pas en paroles, mais en actions et en vérité (1 Jean 3 :18). La mission et l’Eglise en Afrique peuvent proposer un soutien face à la maladie (dispensaires, hôpitaux…), un soutien à l’éducation pratique (centres de formation technique, agroécologie…), des stratégies sociales et médicales face aux grandes épidémies (lèpre, SIDA…).
3 – et enfin la formation des pasteurs et responsables pour fortifier les églises et leur permettre de relever les défis.
L’Eglise vit et se nourrit de la Parole du Seigneur. Il importe de pouvoir aider les églises locales à relever le défi du renouvellement de responsables d’églises à même d’instruire tous ceux qui rejoignent l’Eglise : « Et ce que tu as entendu de moi en présence de beaucoup de témoins, confie-le à des hommes fidèles, qui soient capables de l’enseigner aussi à d’autres. » (2 Tim. 2:2). Nous constatons sur place un grand manque de responsables qualifiés au regard de la taille des églises. Ce déficit s’explique d’une part par la croissance des églises ces dernières années et d’autre part par la souffrance des instituts de formation. Le manque de moyens financiers freinant les bonnes volontés.
Le pôle mission des CAEF au travers des missionnaires envoyés sur le champ ou dans le cadre des partenariats engagés avec des unions d’églises (MEIM à Madagascar, ACT et AET au Tchad) s’attache avec vous à relever ces défis. En effet, l’Esprit que nous a donné le Seigneur n’est pas un esprit de timidité, mais un Esprit de Force, d’Amour et de Sagesse
(2 Tim. 1 :7).
Ensemble, encourageons-nous dans ces bonnes œuvres (Tite 3 :14)
Charles Leroux.