Loi de Dieu ou loi des hommes : pas de concurrence

Loi de Dieu ou loi des hommes : pas de concurrence 

Après avoir été voté à l’Assemblée Nationale le 16 février par 347 voix pour, 151 voix contre et 65 abstentions, le projet de loi confortant le respect des principes de la République sera examiné en première lecture, au Sénat, à compter du 30 mars. 

Nos Églises Évangéliques, constituées pour 90% d’entre elles en associations 1905, sont les victimes collatérales d’une loi visant à lutter contre les séparatismes. Nous soutenons sans réserve les dispositions du projet de loi permettant de lutter contre cette frange minoritaire de l’Islam en France, (l’islamisme politique djihadiste), mais pour éviter de donner l’impression de regarder dans une seule direction, par besoin de « caution égalitariste » (formule utilisée par le CNEF), on pointe d’autres menaces religieuses et, entre autres, le protestantisme évangélique. 

Nous pouvons néanmoins douter de l’efficacité d’une telle loi pour que celles et ceux qui veulent vivre à part, dans la République, rejoignent un statut officiel soumis au regard des préfets. Il est d’autre part regrettable, que cette loi stigmatise, sans différenciation, tous les croyantsLe projet de loi, et sa présentation, véhiculent un « discours de défiance vis à vis du religieux», « il rompt avec la tradition laïque française », nous dit le politologue Philippe Portier (directeur d’études à l’EPHE). Ce grand spécialiste de la laïcité souligne qu’on bascule d’une «intervention minimale de l’État» vers une intervention «maximale» dans les affaires religieuses. 

Les diverses religions chrétiennes se sont efforcées d’alerter les membres du gouvernement sur les risques de dérives que présentent certains articles de cette loi. Elles ont fait remarquer que, dans une certaine mesure, elle impliquait une forme d’entrave à la liberté de culte et à la libre organisation du culte. Néanmoins, dans le contexte politique actuel et au vu des débats menés à l’Assemblée Nationale, il est fort peu probable que le bien-fondé de cette loi soit remis en question par le législateur. 

Les déclarations de certains membres du gouvernement ont aussi révélé, au mieux une méconnaissance du monde évangélique, et au pire, une inculture religieuse préoccupante. Sur ce point, voici le conseil formulé par Sébastien Fath, dans un excellent article paru dans le Figaro du 05/02/2021 : « On parle souvent de former les représentants religieux à la laïcité. Il serait opportun de mieux former les dirigeants politiques aux religions. » 

Concrètement, ce projet de loi, en l’état, va compliquer la vie de nos associations, en raison de contraintes et de contrôles multipliés.

Contrôle systématique par le préfet, tous les cinq ans, de la qualité cultuellecontrôle redoublé des activités et des propos tenus au-delà de celui qui s’exerce dans les secteurs de la vie associative, contrôle des financements venus de l’étranger et des ressources des associations cultuellesSur ces points, il nous faudra réfléchir à ce qui peut être mutualisé, au niveau de l’Union ou au-delà, pour alléger la charge administrative et comptable des Églises.  

Dans une moindre mesure, exigence supplémentaire d’allégeance explicite aux principes républicains pour les associations voulant mener une activité avec l’aide de subventions publiques La restriction des possibilités de l’instruction à la maison, en passant d’un régime de déclaration à un régime d’autorisation, ne concerne pas directement nos associations cultuelles et nos Églises. 

Face à  ces contraintes supplémentaires, le CNEF, dont nous saluons le travail d’information, de réflexion et de propositiona communiqué au ministère de l’intérieur, au président du Sénat et aux parlementaires qui le souhaitent, les quatre suggestions suivantes (texte complet) : 

  • Garantir la survie des petites et moyennes associations cultuelles par la proportionnalité des mesures 
  • Clarifier la notion de culte, pour les associations mixtes, afin d’ éviter des questionnements autour du champ d’application des mesures 
  • Cibler plus précisément les situations préoccupantes liées aux fonds provenant de l’étranger 
  • Encourager un financement français et autonome des associations cultuelles. 

D’autre part, le conseil d’Etat ayant estimé que les nouveaux avantages ouverts par le projet de loi compensaient ces nouvelles contraintes, le CNEF propose 5 amendements pour renforcer les garanties du libre exercice du culte en France. (À consulter ici). 

Dans ce contexte, comment nous positionner en tant que chrétiens évangéliques ?

Même si nous pouvons légitimement nous inquiéter d’une remise en cause de certains principes de la loi 1905, nous ne devons pas nous laisser accaparer par un débat politique, au risque de nous détourner de notre mission. Le fait que Gérald Darmanin affirme, dans une tribune parue dans le Figaro du 14 mars, que le projet de loi « ne menace en rien la liberté des religions » ne doit, ni nous rassurer ni alimenter notre suspicion, par rapport à la motivation du gouvernement. Sa stigmatisation répétée des évangéliques dans les médias ne doit pas non plus nous impressionner, nous décourager ou nous inciter à la surenchère. 

Le NT nous invite  plutôt à : 

  • Prier pour les autorités afin que nous puissions mener une vie paisible et tranquille, en toute piété et en tout respect (1 Ti 2.1-2) 

  • Rendre à l’empereur ce qui est à l’empereur et à Dieu ce qui est à Dieu (Mc 12.17) 

  • Nous soumettre aux autorités (Rom 13.1 ; Tite 3.1) 

Notre royaume n’est pas de ce monde (Jn 18.36), nous sommes citoyens du monde mais sans volonté d’y imposer la loi de Dieu. Par contre, nous voulons et nous pouvons, malgré toutes les limites auxquelles on voudrait nous soumettre, être sel et lumière et briller tels des flambeaux au milieu d’une génération perverse et corrompue (Phi 2.15). 

C’est le rôle prophétique de l’Eglise, missionnelle dans son interaction avec le monde, fidèle dans l’annonce de l’Évangile, quel que soit le contexte  ! 

Appel à la prière du CNEF 

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