Vers une charte de déontologie ?

Lors de l’AG 2025, l’ensemble des responsables des Eglises CAEF auront à se prononcer sur un nouveau document de référence pour l’union, une charte de déontologie pour le travail ensemble*. Elle prolongera l’engagement à la collaboration mutuelle des uns et des autres validé l’an passé avec le document au sujet de l’Eglise Une proposé par le Réseau FEF.
Elle aura pour buts d’engager les responsables CAEF à respecter la diversité d’opinions théologiques et à l’encourager au sein de nos Églises, mais aussi d’en rappeler le cadre pour pouvoir vivre cette diversité dans la vérité et de manière constructive.
- Cette charte pose donc le cadre dans lequel s’exerce la diversité (les Ecritures, la confession de foi et ses bases théologiques),
- Elle qualifie la dite diversité (dons et ministères, diversité des membres, diversités d’interprétations de points secondaires)
- Elle rappelle la force du péché pour en ternir l’expression saine, mais aussi la nécessité et les modalités des engagements attendus de chacun pour la laisser s’exprimer.
Retour sur l’émergence d’un texte et de l’histoire récente de l’union.
Ensemble, progressivement
Depuis sa fondation en 1995, l’Entente Évangélique des CAEF a beaucoup grandi, et a été amenée régulièrement à penser sa structuration, compte tenu de sa croissance rapide.
Au fil des années,
- les mutualisations nécessaires,
- la professionnalisation du suivi administratif,
- la meilleure formation des cadres,
- le suivi des ministères avec l’augmentation du nombre de pasteurs,
- le développement des ministères « jeunesse »
ont accru le nombre de missions portées par l’ensemble des Églises.
En même temps, il s’agissait de ne pas dévaluer l’importance de la gouvernance locale, et de garder un équilibre entre le local et le national. Ces éléments ont posé un certain nombre de questions ecclésiologiques.
C’est ainsi que progressivement, l’union – par le biais de la CSR ou de la commission théologique – s’est dotée de textes cadres, validés en AG, qui ont façonné l’identité des CAEF et servent aujourd’hui de véritables balises en tant que textes de référence.
Par ailleurs, évoluant au sein d’un milieu évangélique dynamique, l’union a aussi été façonnée par les pensées des théologiens des divers courants de l’évangélisme mondial. Citons, entre autres, les apports du mouvement de Lausanne, des Brethren (notre famille internationale), mais aussi plus étroitement par les réflexions du R-FEF, du CNEF et celles, décisives, des centres de formations francophones auxquels nous sommes liés.
Ensemble, parfois douloureusement
Par ailleurs, dans son rôle de facilitateur, la CSR a été amenée, de nombreuses fois, avec plus ou moins de réussite, à gérer des crises d’Églises locales, à apaiser des tensions relationnelles entre serviteurs, au sein de pastorales et même en son sein. Les questions théologiques, les questions ecclésiologiques, les conflits de personnes, les crises, mais aussi les discussions paisibles, les apports des uns et des autres et les joies au sein de l’union ont amené progressivement la question d’un fonctionnement plus efficient au sein de l’union. Il y a eu là tout un apprentissage, parfois dans la douleur et sous l’impulsion de Pierre Bariteau et d’Eric Waechter, bien des choses ont été structurées et améliorées de ce point de vue.
Ensemble, au sein de la crise
En parallèle, et plus ou moins simultanément avec la crise du Covid-19, une réflexion théologique a traversé l’évangélisme global et francophone en particulier, avec des apports de théologiens comme Jacques Nussbaumer, qui ont mis le sujet de l’Eglise Une au cœur des réflexions, dans un moment où la foi chrétienne était, de fait et par nécessité, vécue de manière hyper individuelle, tout en cherchant à vivre quelque chose de la communion. Rappelez-vous, chacun chez soi, avec son ordinateur, son morceau de pain… Chacun a essayé de vivre ces moments comme il le pouvait avec la crainte du virus.
De manière moins glorieuse, ce temps a aussi permis de révéler une tendance à la concurrence au sein même de l’Eglise de Christ, entre des communautés locales qui jouaient des coudes avec les voisines. Les missions, associations et sites internet n’étaient pas en reste. Chacun essayait d’exister dans un contexte d’incertitude majeure, en utilisant plus ou moins bien les outils numériques. Bien des responsables d’Eglise ont souffert à ce moment.
Ensemble, l’Eglise
Dans ce contexte de crise, la question ecclésiologique fondamentale : « Qu’est-ce que l’Eglise ? » a pris un relief particulier. Et précisément, pour le dogmaticien de Vaux sur Seine, la question prenait une couleur nouvelle. C’est ainsi que progressivement, sous son impulsion, la CSR a retravaillé la question de l’Eglise, de sa diversité en tant que corps… Il fut alors question de prairie avec ses fleurs variées, ses couleurs et ses formes multiples.
Les enjeux apparaissaient nettement : favoriser la croissance des plantes, pour qu’il y ait un maximum de fruits et reconnaitre avec gratitude ce que le Seigneur donne en divers endroits de la prairie. Reconnaitre aussi le travail fidèle de tous ceux qui agissent avec zèle au quotidien sur le terrain.
En même temps, pour qu’un écosystème existe, il faut aussi veiller à une certaine diversité, mais sans pour autant laisser toutes sortes de choses pousser dans la prairie.
Par ailleurs, définir ce qu’est une bonne plante nécessite parfois de regarder avec plus d’attention, car parfois une plante peut paraître insignifiante, et pourtant être extrêmement précieuse pour l’ensemble. Inversement, si une plante particulière se développe fortement (au point de devenir envahissante), elle peut mettre en péril l’ensemble de la prairie, causant la disparition de sa diversité, sans même le vouloir. Et en même temps, on ne peut que se réjouir de la croissance d’une plante… surtout quand elle porte de beaux fruits.
Vous le comprenez bien, cette réflexion champêtre touche aux églises et aux mêmes problématiques ecclésiologiques que celles que nos prédécesseurs ont dû gérer au sujet des tensions inter-Eglises, entre couleurs ministérielles, options théologiques, modalités de croissance, manière d’être Eglise localement, tout en reconnaissant toujours que les uns et les autres sont attachés à l’Évangile de Jésus-Christ, et sont membres de la même Eglise.
Ensemble, face à Dieu
La CSR a aussi intentionnellement pris beaucoup plus de temps à l’écoute de Dieu. Lors de retraites spirituelles, conduites par Alain Marionnet, nous avons été amenés à revisiter une mauvaise manière de penser le travail de l’union et de l’Eglise au sens plus large et à faire la distinction entre faire une œuvre pour Dieu et faire l’œuvre de Dieu.
Matthieu Gangloff, pour la CSR.